Run Ricky Run


Mardi soir était diffusé sur ESPN America le documentaire "Run Ricky Run". Ce film fait partie de la collection des "30 for 30", trente documentaires réalisés l'année dernière pour les trente ans de la chaîne sportive câblée américaine. N'hésitez pas si vous en avez l'occasion à regarder ces films de très grande qualité qui passent au compte gouttes sur ESPNA.
Celui de mardi donc, dont le sujet était la carrière de Ricky Williams des Dolphins, dépassait largement le cadre du simple portrait et amenait à réfléchir sur des sujets bien plus vastes que la vie d'un coureur de la NFL...

Revenons d'abord sur le parcours de Ricky. Star NCAA à Texas, Heisman Trophy 1998 il débarque en NFL, 5 ème selection de la draft 1999, chez les Saints de Ditka. Après quelques bonnes saisons il est tradé chez les Dolphins. Sa personnalité fait parler dès ses débuts chez les Saints. Ne supportant pas la foule, anxieux, timide, il donne souvent ses interviews caché derrière sa visière le casque sur la tête. Il souffre en fait de dépression chronique, dont l'origine vient peut être de son père et des abus sexuels qu'il lui a fait subir enfant. Se cherchant, cherchant des solutions tant spirituelles que médicales, il se tourne vers le yoga, la spiritualité orientale, l'hindouisme. Il devient végétarien et pour tenir le coup fume un peu voir beaucoup d'herbe. Il est attrapé par la patrouille anti dopage de la ligue puis, au fond du trou, décide de quitter la ligue en 2004. Il prend une année sabbatique, voyageant aux 4 coins de la planète en routard mode hippie, sac à dos et pétards.

Dans une ligue reflet d'une Amérique conservatrice aux valeurs morales strictes, familiales, son parcours surprend, choque. Cette NFL macho, plus habituée à gérer des problèmes d'armes à feux, de sexe, de violence ou de dopage ne sait comment se positionner devant un joueur qui assume ses faiblesses psychologiques, un style de vie "new age" et qui ne considère pas le football comme LA chose la plus importante dans sa vie. La presse spécialisée, en grande partie composée d'anciens coachs et joueurs qui "baignent" depuis leur adolescence dans cette ambiance 100% testostérone, se défoule sur ce "beatnic" désormais barbu, qui s'affiche avec Jim Brown le très engagé (à gauche) ancien coureur des Browns, autre banni de la "famille NFL".

A son retour Ricky se fait à nouveau contrôler positif à la marijuana et après une petite saison 2005 il est suspendu pour toute la saison 2006. Il trouve refuge en CFL, aux Argonautes. A nouveau il est ridiculisé par la presse, le petit monde de la NFL. A Toronto il retrouve de bonnes sensations et se met à aimer à nouveau le football. Les Dolphins lui donnent une dernière chance. Finalement, mieux dans sa vie, marié et père de famille, prof de yoga et enfin accepté par ses coéquipiers, Williams retrouve le succès sur le terrain. L'an passé il fait une superbe saison avec 1121 yards et 11 Tds. Il sera encore là cette année, backup de luxe et "vieux sage" à Miami.

C'est avant tout ce clash entre deux mondes diamétralement opposés qui rend ce documentaire passionnant. L'incompréhension entre un monde du foot pro refermé sur lui même et son univers violent de cow-boys inoxydables idolâtrés par l'Amérique profonde et un homme fragile qui fait des choix de vie à l'opposé de ceux magnifiés par la NFL. On ne peut s'empêcher de penser à tout ses joueurs NFL, coupables de crimes, d'actes de violence, de véritable dopage, immatures, accrocs aux anti-douleurs, à l'alcool, impliqués dans des affaires de moeurs ou de drogue qui n'ont jamais eu à subir le tiers de la moitié des railleries, insultes et critiques subies par Ricky Williams. Comme si le premier et principal "crime" de Williams avait tout simplement été d'être différent. A méditer...

1 commentaire:

  1. Superbe article! Bravo!ESPN America diffuse de très beaux reportages comme le 60 minutes! Merci encore de nous rappeler que le sport n'est pas qu'une histoire de muscles et de gros sous!

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