Cobb, the Georgia Peach.

Il a les stats officielles suivantes:

Batting average : .367 (record en carrière)
Hits: 4 191
Home runs: 117
Runs batted in: 1 938
Bases volées: 892 dont 54 fois le marbre (record MLB)

1 AL MVP
1 Triple Crown
12× AL batting champion
1 AL home run champion
4× AL RBI champion
6× AL stolen base champion

Mais Tyrus Raymond "Ty" Cobb c’était bien plus que ces incroyables chiffres. Une personnalité sans nulle autre pareille dans l’histoire du sport pro, une longévité et un état d’esprit hors du commun, Cobb était un monstre incomparable à l’époque où le baseball dominait sans partage le paysage du sport aux Etats Unis. Né en 1886 dans le fin fond d’une Géorgie qui portait encore les traces de la guerre civile, mort richissime plus grâce à Coca Cola qu’à sa carrière de joueur de baseball, il a eu un destin aussi improbable que spectaculaire.

Fils de petits paysans du Vieux Sud, Cobb est fasciné gamin par le baseball mais sa carrière débute par un drame. Quelques jours avant de signer son premier contrat avec les Detroit Tigers sa mère abat par accident son père. Ce dernier croyant sa femme infidèle l’espionnait et c’est effrayée par l’ombre de son mari derrière sa fenêtre, croyant à un cambrioleur, qu’elle le tue d’un coup de pistolet. Le 30 août 1905, à 18 ans c’est donc avec son père au cimetière et sa mère en taule que le jeune Ty joue son premier match comme champ centre des Tigers. Cette tragédie laissera longtemps sa marque et fut peut être à l’origine de la légendaire mauvaise humeur et du sale caractère de Cobb.

Il se fait rapidement sa place dans l’une des meilleures équipes de l’American League et participe à trois World Series en 1907, 1908 et 1909, trois défaites et les seules participations aux playoffs de sa longue carrière. Il sera en effet plutôt mal entouré tout le reste de sa carrière jouée presque exclusivement à Detroit. Dans ce baseball du début du 20ième siècle où les Home runs sont rares il est le joueur offensif parfait. Des moyennes au bâton indécentes, un flair parfait pour voler les bases, un grand sens du jeu et une agressivité de tous les instants. On a du mal à réaliser quand on ne connait que le baseball moderne comment il a pu faire certains de ses exploits : Quatre fois dans sa carrière il vole successivement les secondes et troisièmes bases plus le marbre ! En 1909 il gagne la Triple Crown en tapant seulement 9 home runs pendant la saison, seulement 9 mais tous des « inside the park » ! Crampons en avant, dents serrées il est un tueur sur les bases et utilise tous les moyens possibles et imaginables pour arriver à ses fins.

Parfois contre l’esprit sportif comme en 1910 quand il refuse de jouer les derniers matchs de la saison pour gagner le batting title (et la voiture Chalmers réservée au vainqueur) aux dépends de Nap Lajoie, où quand l’année d’après il souffle ce même titre à son propre coéquipier Shoeless Joe Jackson en le harcelant mentalement. Pour Cobb le « baseball c’est comme la guerre » et il ne s’embarrasse jamais de sentiments sur le diamant.

Un match « à la Cobb » ça pouvait donner ça : 12/05/1911 contre les NY Highlanders. Cobb marque depuis la première sur un simple en champ droit puis un autre point depuis la seconde sur un wild pitch. En 7ème il égalise en faisant marquer sur un double très chaud sur la seconde base. Les Highlanders protestent le « safe » de l’arbitre mais oublient de demander un temps mort. Pendant que tout le monde palabre Cobb marche jusqu’à la troisième base puis toujours en marchant se rapproche du marbre doucement avant de se mettre subitement à courir et d’aller marquer le point de la victoire devant la foule médusée !

Mais Ty Cobb c’était aussi de l’action hors des terrains avec de nombreuses bagarres que son arrogance et son caractère de cochon provoquaient régulièrement. En mai 1912 il monte même en plein milieu d’un match dans une tribune des Polo Grounds de New York pour aller se battre avec un supporter. Quand il arrive devant lui il s’aperçoit que le pauvre bougre est manchot et n’a que trois doigts à sa seule main. Ca n’arrête pas Cobb qui lui saute à la gorge ! Une autre fois il retrouve l’arbitre derrière la grande tribune du stade après le match pour régler ses comptes à coups de poings. Ses coéquipiers doivent le maitriser alors qu’il est train de « finir » l’arbitre en l’étranglant.

On lui reprochera (surtout après-guerre quand plusieurs biographies paraitront à son sujet) aussi un certain racisme qui se révéla plusieurs fois dans d’autres « bastons ». Il l’était probablement, comme sans doute une vaste majorité des « petits blancs » du Vieux Sud nés quelques décennies après la guerre de Sécession. Mais à sa décharge on notera qu’après sa retraite il soutiendra l’intégration des joueurs noirs dans les équipes de la MLB. Il considérait d’ailleurs Jackie Robinson comme un des très rares joueurs de l’époque à maitriser les fondamentaux du baseball, il regrettait que le baseball soit devenu un jeu plus marqué par les gros coups de batte. (Qu’aurait il dit du baseball moderne ?!!!)

Pendant ses années sous le maillot des Tigers il aura des relations compliquées avec celui qui fut son mentor à son arrivée, le champ droit Sam Crawford. Seule autre vedette de l’équipe, quand Shoeless fut parti à la White Sox, Crawford ne se fera jamais au caractère impossible de Cobb et les deux ne se parlaient presque pas, communiquant simplement par signe pendant les matchs. Pourtant à la mort de Cobb on découvrit qu’après leur carrière ce dernier avait envoyé des centaines de lettres dans tout le pays pendant des années pour que Crawford le rejoigne au Hall of Fame (ce qui fut fait en 1957) .

Ty Cobb n’a sur les diamants comme ailleurs jamais peur de se mettre en danger. Ainsi après la saison 1918 il s’engage pour rejoindre l’US Army sur le front. Il participe ainsi au dernier mois de la Grande Guerre en France.

A son retour sa place de meilleur joueur de baseball est remise en question par la montée en puissance de Babe Ruth du côté des Yankees. Les deux joueurs ont des styles complètement différents et Cobb n’apprécie guère le baseball puissant de Ruth. De plus ils n’ont pas grand-chose en commun, Cobb vit pour et par le baseball et y consacre toute sa vie tout en gardant une condition physique impeccable quand The Babe fait parler autant de lui sur qu’en dehors des terrains vivant la grande vie new yorkaise dans les meilleurs bars et restaurants, au bras des plus belles femmes de la ville montrant son ventre plutôt bedonnant et comptant avant tout sur un talent inné pour écraser la concurrence.

Cobb piqué au vif et âgé de 38 ans décide ainsi en 1925 qu’il peut aussi jouer « à la Ruth ». Il annonce à la presse qu’il va pour la première fois de sa carrière jouer en essayant de taper des home runs. Deux jours plus tard il a tapé 5 home runs avec un 9/12 à la batte mais décide finalement, et sans aucun doute fier d’avoir prouvé sa supériorité, de rejouer au baseball comme il aime y jouer !

Entre temps il aura aussi été manager des Tigers tout en continuant à tenir sa place en champ centre. Une position plutôt surprenante, Cobb étant en général peu aimé par ses coéquipiers et pas très doué pour la communication. Mais un choix qui disait-on faisait économiser un salaire au proprio très radin des Tigers !

En fin de carrière Cobb jouera deux saisons (1927-1928) chez les Athletics alors basés à Philadelphie, une équipe à la fois jeune et plus talentueuse que ses Tigers mais qui ne pouvait rivaliser pour le titre de l’AL face aux mythiques Yankees de ces années-là. Il prend sa retraite fin 1928 encore en pleine forme battant encore cette saison-là au-dessus des .300.

Même si il ne jouait plus en compétition Cobb continuera à faire de temps à autres quelques matchs de gala ou démonstrations, avec toujours la même ardeur, le même flair et le plus grand manque de fair play. Ainsi en 1947 (il a alors 61 ans) dans un match « Old Timers » au Yankee Stadium, passant à la batte il dit au catcher de se reculer un peu car il a peur de le toucher ne maitrisant plus trop son bras. Le catcher se met alors à distance respectable derrière lui et Cobb en profite pour faire un bunt parfait juste devant la plaque que le pauvre catcher trop éloigné ne peut récupérer à temps pour faire le mort !

A la retraite Cobb saura parfaitement faire fructifier son pactole gagné sur les terrains, achetant notamment beaucoup d’actions de Coca Cola qui va profiter à plein régime d’abord de la Prohibition puis ensuite du boom économique d’après-guerre . Il est aussi propriétaire de plusieurs usines d’embouteillages de la marque. A sa mort en 1961 il possédait l’équivalent de 93 millions de dollars de 2014.

Détesté et critiqué pendant sa carrière il n’en était pas moins respecté pour ses incroyables performances. Ainsi il sera lors de la création du Hall of Fame en 1936 celui qui recevra le plus de votes de la première promotion de joueurs battant même, pour une fois, Babe Ruth.

La vieillesse à défaut de lui donner des amis, il n’en eu pratiquement jamais, lui donna un peu de sagesse et de considération pour autrui. Ainsi il fera profiter de sa richesse la communauté avec la création d’un hôpital dans sa ville natale (qui fut le premier de ce qui est aujourd’hui un groupe important de centres de santé dans le Sud) et l’établissement avec le quart de sa fortune à sa mort d’un fond de financement de bourses universitaires pour des jeunes issus de milieux modestes en Géorgie.

Mais jusqu’au bout il sera animé de cette flamme particulière qui en avait fait un joueur spécial. Tommy Lee Jones dans le film « Cobb » sera d’ailleurs particulièrement convainquant dans son rôle d’un Ty Cobb vieillissant mais toujours aussi acide et percutant.

On pourra voir et revoir ce film, lire anecdotes et comptes rendus de l’époque avec une certaine nostalgie d’une ère sans doute bien moins politiquement correcte de la nôtre, peuplée de personnages hauts en couleur dont Ty Cobb était le plus beau specimen !

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